CENTRE D'ETUDES HISTORIQUES - 11270 FANJEAUX
LES CAHIERS DE FANJEAUX
L'encyclopédie de l'histoire religieuse du Midi au Moyen Age
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La troisième décennie des colloques s’est ouverte par des sessions consacrées aux Cisterciens et à Raimond Lulle, déjà évoquées ; puis à la place des femmes dans la vie religieuse du Languedoc, qu’il s’agisse de laïques ou de moniales, de Clarisses ou de recluses (Cahier 23, 1988). Les rencontres suivantes ont concerné des communautés essentielles dans le monde ecclésiastique : celle des chanoines, importants par leur nombre et leur diversité, ainsi que par les offices qu’ils accomplissent et leur rayonnement spirituel et intellectuel, puis celle de la paroisse, structure fondamentale de rassemblement des fidèles dans l’Église (Cahiers 24 et 25). À ce moment (1991), il fut jugé utile et nécessaire par le Comité de publier les tables et des index généraux des vingt-cinq premiers Cahiers ; le volume (Cahier 25 bis) présente non seulement le bilan d’un quart de siècle de recherche sur l’histoire religieuse de la France méridionale au Moyen Âge, il permet de retrouver aisément les références concernant tel personnage, tel lieu, tel thème ou telle institution. Durant les vingt-cinq ans allant de 1965 à 1990, cent quatre vingt dix-sept historiens ont contribué à l’édification de la collection monumentale formée par les Cahiers de Fanjeaux, un corpus de 9775 pages et de 408 articles.
Après un long XIIIe siècle (1209-1315), s’ouvre une nouvelle période de l’histoire religieuse du Midi, avec l’installation de la papauté à Avignon. La capitale de la chrétienté se fixe désormais aux confins de la Provence et du Languedoc ; en outre, les papes, Bertrand de Got (1305-1314), Jacques Duèse (1316-1334), Jacques Fournier (1334-1342), Pierre Roger (1342-1352), Étienne Aubert (1352-1362), Guillaume Grimoard (1362-1370) et le second Pierre Roger (1370-1378) sont tous des Occitans, entretenant un rapport privilégié avec la France méridionale, où vit leur famille, où ils ont fait leurs études, au moins pour partie, et où ils ont exercé des responsabilités ; par exemple, Jacques Duèse, originaire de Cahors, pape sous le nom de Jean XXII, avant de devenir chancelier des Angevins de Provence et de Sicile, évêque de Fréjus puis d’Avignon, a été chanoine d’Albi et, vers 1295, official de Carcassonne. Son rôle personnel a été capital dans la définition des structures de l’Église avignonnaise. Aussi bien, le Cahier 45 (à paraître fin 2011) contribuera-t-il au renouvellement actuel des études sur ce personnage et un pontificat novateur et sur un personnage paradoxal, « vieillard sans cesse inventif et néanmoins habité par une tradition austère et vivifiante » . Si l’Église est universelle, la fixation des papes à Avignon ne laisse pas d’exercer un impact sur l’Église du Midi. Fait symptomatique : les deux premiers volumes des Collectorie, témoignage de la fiscalité avignonnaise, concernent le diocèse d’Albi. Le Midi possède un poids relatif important dans l’Église à cette époque, puisque sur cent vingt-neuf prélats pourvus de la dignité cardinalice entre 1305 et 1378, quatre-vingt dix-neuf, soit plus des trois-quarts, sont issus de la France méridionale. Jean XXII modifie très profondément la géographie diocésaine et la répartition des collégiales. Et l’affaire des Spirituels ne revêtirait sans doute pas la même intensité, ni la même gravité, si le pape ne résidait pas à Avignon. Aussi bien, le Cahier 26 (1991) a-t-il évoqué de manière détaillée les rapports entre la papauté d’Avignon et le Languedoc.
Le XIVe siècle correspond, notamment, à la gestation de l’État monarchique ; elle s’accompagne d’une crise polymorphe : guerres et pestes. Les secousses sociologiques qui en résultent s’accompagnent d’ébranlements spirituels. Dans le midi se développe un prophétisme eschatologique, dont l’une des figures marquantes est Jean de Roquetaillade. Ce mouvement se prolonge évidemment durant le Grand Schisme, avec Constance de Rabastens et Marie Robine. En ce temps, les papes ont leurs astrologues. Le Cahier 27 a tenté de rendre compte des phénomènes « à la marge », à travers lesquels les contemporains cherchaient à comprendre le monde et leur temps. Pour atteindre la sensibilité religieuse des chrétiens de l’époque un colloque s’est livré à l’analyse du décor des églises. En effet, ce dernier porte encore la charge sacrée qui gouvernait les cérémonies publiques et les prières individuelles. Le Cahier 28 montre la place de l’ornementation dans les églises durant la période gothique, ses rapports avec l’autel, sa signification, sa fonction dans la pastorale. Quant à lui, le droit canonique n’est pas sans rapport avec la vie. Derrière les codes et les règles se profilent les hommes ; le Cahier 29 porte pour titre L’Église et le droit dans le Midi (XIIIe-XIVe siècle) ; pour autant, il ne traite pas d’une discipline froide et désincarnée, mais témoigne d’une chrétienté vivante. Il s’organise selon trois directions : la place tenue par les canonistes du Midi dans l’élaboration du droit de l’Église, la genèse et l’originalité des codes provinciaux et diocésains ; le fonctionnement des instances judiciaires chargées de contrôler le passage du droit ecclésiastique dans les faits.
Le vingt-neuvième colloque aura été le dernier à connaître la présence rayonnante du Père Vicaire, qui rendait pleins et chaleureux les jours de Fanjeaux. Il avait poursuivi avec enthousiasme et persévérance l’entreprise qu’il avait lancée avec le chanoine Delaruelle, composant avec les colloques la somme d’histoire religieuse que constituent les Cahiers de Fanjeaux. Sa disparition brutale, le 2 octobre 1993, n’a pas interrompu son œuvre, car il avait su rassembler autour de lui une équipe capable de relever son héritage pour honorer sa mémoire. Le Comité du Centre historique de Fanjeaux, sous l’autorité bienveillante d’Henri Gilles, son président depuis 1972, à côté des membres anciens, Philippe Wolff, Bernard Guillemain, Jean-Louis Biget et Monique La Mache, s’il avait perdu le P. Amargier - démissionnaire - et Yves Dossat (décédé en 1992), avait intégré de nouveaux membres, Jean Rocacher en 1983, Daniel Le Blévec - immédiatement chargé des tâches d’organisation - en 1987, Jacques Paul en 1988, puis Michelle Fournié et le P. Bernard Montagnes en 1992.
La cathédrale représente un univers foisonnant. Elle marque le paysage urbain et la topographie citadine. Elle engendre souvent un quartier complexe, où voisinent le palais épiscopal et l’enclos canonial. Dans la cathédrale se manifeste, à travers la liturgie, les reliques, le décor, l’immanence du sacré. Elle exprime de manière visible, la communauté diocésaine, regroupée autour de l’évêque, chargé de l’autorité et de la mission apostolique. Elle cristallise tout le Moyen Âge « énorme et délicat ». Miroir d’une foi dynamique et d’un prodigieux essor de l’économie et de la technique, elle fait l’objet d’un droit spécifique, elle abrite une population cléricale diversifiée, qui célèbre une liturgie particulière, et elle entretient avec la société extérieure des relations multiples et variables. C’est cette richesse que le Cahier 30 met en lumière pour les pays du Midi.
Durant la troisième décennie de Cahiers, ceux-ci ont naturellement bénéficié de la collaboration d’intervenants antérieurs et des contributions des membres du Comité, mais ils ont également tiré profit des compétences d’universitaires étrangers et de nouveaux chercheurs français. Au rang des premiers, Edith Pasztor, Antonio Garcia Garcia, J.N. Hillgarth, Martin Bertram, Gérard Fransen, Giulia Barone, Christian Freigang, Francesco Santi, Franz Felten, Ruedi Imbach, Ramon Sugranyes de Franch. Parmi les seconds, dom Jean Leclercq, Jean Longère, Henri Platelle, Henri Vidal, Marie-Madeleine Gauthier, Paulette L’Hermitte-Leclercq, Elisabeth Magnou-Nortier, Geneviève Hasenohr, Joseph Avril, Anne-Marie Hayez, Pierre-Roger Gaussin, et puis Jacques Krynen, Jean-Louis Gazzaniga, Yves Esquieu, Yvette Carbonell-Lamothe, Michèle et Henri Pradalier, Martin Aurell, Dominique Urvoy, Jacques Verger, Nicole et Jean-Loup Lemaitre, Françoise Robin, Olivier Poisson, Bernadette Barrière, Mireille Mousnier, Hélène Millet, Dominique Rigaux, Matthew Tobin, Quitterie Cazes, Sylvie Barnay, Colette Beaune et Jean-Patrice Boudet.
Cahiers 31 à 40. Nouvelle mue : Publication annuelle d’histoire religieuse du Midi de la France au Moyen Âge.